Acheter de l’immobilier en VEFA est une opération au long cours. Elle démarre avec la signature du contrat de réservation et s’échelonne autour des étapes que sont la signature de l’acte chez le notaire, les appels de fonds et la livraison.
La VEFA, aussi appelée « vente sur plan » est une opération « ordinaire », juridiquement bien balisée mais pourtant, pour chaque acquéreur, elle représente des enjeux concrets, parfois considérables et, forcément, des risques.
Des risques de déception lorsque le bien livré n’est pas conforme à l’idée que l’acheteur s’en était forgée. Des risques financiers, lorsque de retard de livraison ne permet pas la mise ne location du bien, entraîne la perte de l’avantage fiscal escompté. Des risques techniques aussi, lorsque des malfaçons apparaissent.
Le pire des risques est peut-être celui d’abandon du chantier par le promoteur, l’hypothèse – hélas pas seulement théorique – d’un promoteur en difficulté financière qui n’est plus en mesure de payer les entreprises malgré les appels de fonds réalisés auprès des acquéreurs.
Bien sûr, au moment de signer, l’acquéreur ne recevra que des signaux rassurants : « ne vous inquiétez pas, vous serez indemnisés en as de retard de livraison », « tel risque est couvert par telle assurance ou garantie », etc. Mais, concrètement l’acquéreur ne bénéficiera des diverses assurances et garanties que s’il remplit strictement leurs conditions de mise en œuvre.
C’est pourquoi, quelle que soit la situation, l’angoisse qu’elle génère, et même la pression du promoteur sur les acquéreurs, l’on ne peut que leur recommander aux acquéreurs de se faire accompagner par un avocat expert en VEFA pour mettre en place les « bonnes » actions, c’est-à-dire celles qui – a minima – ne leur feront perdre aucun droit.
C’est la leçon que l’on doit tirer d’un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris qui refuse à des acquéreurs le bénéfice de la garantie financière d’achèvement tout simplement parce qu’ils avaient essayé de trouver un accord avec le promoteur et lui avaient versé des sommes qu’ils ne lui devaient pas encore.
Sommaire
Qu’est-ce que la garantie financière d’achèvement ?
La garantie financière d’achèvement, que l’on appelle également garantie extrinsèque, c’est l’engagement d’un tiers (une banque ou une compagnie d’assurance) aux côtés du promoteur pour financer les travaux si le promoteur était défaillant.
En d’autres termes, le garant d’achèvement apporte sa caution financière pour pallier le risque d’abandon du chantier par le promoteur et ses conséquences pour les acquéreurs.
Cette garantie est dite « extrinsèque » parce qu’elle est donnée par un tiers à l’opération de vente en l’état futur d’achèvement. A l’inverse de feue la garantie « intrinsèque » qui était délivrée par le promoteur lui-même et dont la fragilité a conduit nombre d’acquéreurs devant les tribunaux.
Aujourd’hui, aucune VEFA ne peut être signée sans garantie extrinsèque. Et, si l’on parle de « garantie d’achèvement », il faut également se souvenir que ce peut aussi être une garantie de remboursement. L’acquéreur sera remboursé des sommes versées au promoteur si celui-ci n’est pas en capacité de mener l’opération de construction jusqu’à son terme.
Dans les 2 cas, le garant d’achèvement n’est pas tenu d’indemniser l’acquéreur des préjudices qu’il subit, notamment en raison du retard de livraison, qu’il ait acheté pour louer ou pour s’y installer.
Plus encore, pour bénéficier de cette garantie doit respecter à la lettre les stipulations du conrrat de vente.
Comment « perdre » la garantie financière d’achèvement
Dans une affaire jugée en 2019 par la Cour d’appel de Paris (CA Paris, pôle 1 – ch. 3, 26 juin 2019, n° 18/26712), les acquéreurs ont « perdu » le bénéfice de la garantie d’achèvement.
Comment est-ce possible ?
Les appartements achetés en VEFA en 2012 devaient leur être livrés au plus tard le 30 juin 2013. Mais le chantier s’est arrêté, notamment parce que les entreprises n’étaient pas payées.
Confronté à un important retard de livraison de leur VEFA, les acquéreurs se sont mobilisés pour obtenir des informations et tenter de trouver une solution. Un accord est intervenu, accord selon lequel les acquéreurs réglaient les appels de fonds anticipés émis par le promoteur en contrepartie de la reprise du chantier.
Malgré ces versements, le promoteur a été placé en en liquidation judiciaire et le chantier n’a jamais repris.
Logiquement, les acquéreurs se sont tournés vers le garant d’achèvement. Mais celui-ci a refusé de financer l’achèvement de l’immeuble au motif que les acquéreurs n’avaient pas respecté les règles applicables en matière d’appels de fonds en VEFA. Autrement dit, en versant des sommes au promoteur, pour lui permettre de reprendre le chantier en dehors du mécanisme des appels de fonds, prévu par la loi et l’acte notarié, les acquéreurs ont « perdu » le bénéfice de la garantie financière d’achèvement.
Les acquéreurs ont donc été piégés par leur souci de trouver une solution amiable ! et parce qu’ils ont accepté de verser au promoteur des sommes qui ne lui étaient pas encore dues.
En effet, pour procéder à un appel de fonds, le promoteur doit adresser aux acquéreurs une attestation établie par l’architecte du chantier précisant l’état d’avancement des travaux : « achèvement des fondations » ; « hors d’eau », « achèvement de l’immeuble ».
L’acquéreur qui paye sans avoir cette attestation prend donc un gros risque.
Si la sanction paraît sévère pour l’acquéreur, elle est compréhensible du point de vue du garant d’achèvement. Le garant d’achèvement s’engage en effet à supporter le coût des travaux qui permettront d’achever l’immeuble mais, en contrepartie, c’est à lui que les acquéreurs doivent verser les fonds qui n’ont pas été appelés par le promoteur avant sa défaillance.
Cette décision de la Cour d’appel de Paris, stricte s’il en est pour les acquéreurs en VEFA, rappelle combien il faut être prudent lorsqu’une VEFA « tourne mal » et s’entourer des meilleurs conseils pour s’extirper de cette situation sans perdre aucun droit.