Comment concilier le fonctionnement de la copropriété avec le confinement obligatoire de la population ?
La crise sanitaire de 2020 conduit syndics, conseils syndicaux et syndicats de copropriétaires à se poser de nombreuses questions :
- Que devient une copropriété qui ne peut pas
tenir d’assemblée générale ? - Doit-on continuer de régler ses charges ?
- Comment assurer aux gardiens d’immeubles des
conditions de travail exemptes de risque ?
Pour répondre à ces interrogations, nous vous proposons
d’aborder successivement 3 thèmes :
- Ce qui change pendant le confinement,
- Ce qui ne change pas dans le fonctionnement de
la copropriété, - Et l’attention particulière qu’il convient
d’apporter aux conditions de travail des gardiens d’immeubles.
Les deux premiers thèmes sont traités par le cabinet SOUSSENS Avocats, expert en copropriété ; tandis que le troisième thème est traité par Maître Virginie LANGLET, avocat expert en droit du travail.
Sommaire
Adaptation des règles de la copropriété au confinement
En raison du confinement, il n’est évidemment plus possible de tenir les assemblées générales de copropriété. Les copropriétaires ne peuvent en effet quitter leur lieu de confinement pour y assister. Les A.G. qui étaient déjà convoquées ont donc été annulées et reportées sine die.
Entre la fin de l’état d’urgence sanitaire, c’est à dire le 10 juillet 2020, et le re-confinement, les copropriétaires ont, de nouveau, pu se réunir, au sein du conseil syndical et en assemblée générale. Et, depuis le 15 décembre 2020, les syndics peuvent de nouveau envisager la tenue des assemblées. De nombreux copropriétaires vont donc recevoir une convocation à l’assemblée générale de copropriété.
Le report des A.G. pose quelques difficultés dont la plus importante concernait le mandat du syndic. Imaginons un syndic dont le mandat devait prendre fin le 30 avril 2020. L’A.G. qui devait normalement statuer sur ce thème : renouvellement du syndic ou changement de prestataire est annulée. Le mandat du syndic prend donc fin sans être renouvelé ou sans qu’un nouveau syndic soit désigné. Ce n’est pas en soi chose très grave, l’immeuble continuera d’être habitable….
La difficulté tient au fait qu’après l’expiration de son mandat le syndic ne peut plus valablement convoquer l’A.G., forcément puis qu’il n’est plus le syndic de l’immeuble.
C’est pour cette raison que le Gouvernement a décidé du renouvellement automatique des mandats des syndics de copropriété et des conseils syndicaux qui devaient prendre fin :
- entre le 12 mars et le 10 septembre 2020;
- et entre le 29 octobre et le 31 décembre 2020.
Ceux qui devaient être redésignés ou remplacés, ils obtiennent en quelque sorte un « sursis » et continuent d’exercer leur mission, aux mêmes conditions financières, jusqu’à sa re-désignation ou à l’entrée en fonction d’un nouveau syndic. Passé ce délai, la copropriété sera dépourvue de syndic.
Le mandat des membres du conseil syndical est également renouvelé de manière automatique. Le nouveau conseil syndical sera lui aussi désigné lors de la première A.G. « post-confinement ».
Les délais pour convoquer l’A.G.
- Pour les mandats qui expiraient pendant le premier confinement, l’AG doit être convoquée avant le 11 mai 2021;
- Et, pour les mandats qui expiraient pendant le second confinement, l’AG doit se tenir avant le 1er février 2021.
Et, jusqu’au 1er juillet 2021,l les assemblées générales peuvent peuvent se tenir en visioconférence ou par correspondance.
Ce qui ne change pas dans la copropriété confinée
L’ensemble des occupants, copropriétaires ou non, continuent de pouvoir utiliser les parties communes de l’immeuble. Il n’est pas envisageable d’interdire à des occupants de les utiliser. Il n’est pas non plus admissible – moralement et en droit – de demander à un infirmer « de ne pas toucher les éléments des parties communes » de l’immeuble qu’il occupe, comme dans l’affaire lyonnaise dont la presse s’est fait l’écho.
Confinement ou pas, le règlement de copropriété s’applique à tous et sans distinction. Naturellement, chacun doit adapter son comportement aux contraintes du confinement et tout mettre en œuvre pour ne pas déranger les autres occupants.
Rappelons encore que les charges de copropriété doivent continuer d’être réglées, quand bien même les travaux entrepris seraient interrompus ou les services habituels réduits, notamment les missions du gardien de l’immeuble.
Les gardiens d’immeubles : obligation de sécurité et droit de retrait
Les syndicats de copropriétaires sont les employeurs des gardiens d’immeubles. Ils doivent donc se conformer aux règles du droit du travail.
Parmi ces obligations, figure l’obligation de sécurité.
Obligation de sécurité
L’obligation de sécurité impose à tout employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité de ses salariés et protéger leur santé physique et mentale
L’employeur doit ainsi prendre des mesures de prévention suffisantes dès lors qu’un risque professionnel est identifié, avant même toute manifestation d’un risque.
Dans le contexte de l’épidémie de coronavirus qui sévit actuellement en France, les syndicats de copropriétaires doivent faire preuve d’une vigilance renforcée.
Conformément à
leur obligation de sécurité à l’égard des gardiens d’immeuble, ils doivent
prendre des mesures de prévention adaptées pour éviter tout risque de
contamination.
Ils doivent leur
permettre d’accomplir leurs fonctions tout en minimisant les risques de
contamination.
Les syndicats de
copropriétaires, via les syndics, doivent informer les résidents de l’immeuble
des mesures prises et des mesures à prendre pour protéger la santé du gardien.
Il est important de faire respecter
les gestes barrières.
Le syndic peut procéder par voie d’affichage dans l’immeuble pour informer les résidents des mesures prises et des préconisations pour protéger la santé du gardien.
Cet affichage peut
comporter des consignes à l’attention des résidents de l’immeuble, par exemple
pour leur demander :
- d’éviter tout contact non urgent
avec le gardien, - ou, lorsque le contact ou l’échange
est inévitable, de respecter la distanciation sociale d’un mètre, - afin de limiter le risque de
propagation du virus, y compris dans la loge du gardien, ne pas rentrer dans la
loge, ne pas discuter avec le gardien devant la porte d’entrée de la loge mais
se tenir à une distance plus éloignée d’au moins 1 mètre.
Le syndic doit fournir au
gardien le matériel approprié pour protéger sa santé (gants jetables,
lunettes de protection, chiffons jetables, gel hydroalcoolique ou permettre au
gardien de se laver les mains avec du savon de manière fréquente, etc).
Les tâches des gardiens
d’immeubles peuvent être aménagées et réduites aux missions
essentielles principales afin de limiter l’exposition du gardien au risque
de contamination, tout en assurant le niveau d’hygiène minimum requis pour
limiter la propagation du virus :
- le nettoyage et la désinfection régulière des parties communes de l’immeuble les plus empruntées et des surfaces les plus utilisées par les résidents de l’immeuble (poignées des portes les plus utilisées, les digicodes, les boutons, boutons d’appel et parois d’ascenseurs, rampes de main courante d’escaliers, etc.),
- l’entrée et la sortie des bacs à ordures,
- la remise des courriers et colis limitée (dépose sous le paillasson et non plus remise en main propre, colis stockés dans la loge sans obligation d’une remise en main propre par exemple, afin de limiter le plus possible les contacts avec les résidents).
Exercice du droit de retrait par le gardien d’immeuble
Le droit de retrait concerne la situation professionnelle dans laquelle un salarié a « un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ».
Il a le droit de se retirer de cette situation, en veillant néanmoins à ne pas créer pour autrui (un autre salarié ou un tiers) une nouvelle situation de risque grave et imminent.
Le salarié doit en informer l’employeur ou son représentant, de préférence par écrit (le mail est possible).
Le salarié décide ainsi de suspendre son activité.
Attention : le droit de retrait tel que prévu par le code du travail vise une situation
particulière de travail et non une situation générale de pandémie.
Dans le contexte actuel de covid-19, l’exercice du droit de retrait n’est pas forcément légitime, les salariés doivent en faire un usage approprié. Cela s’applique également aux gardiens d’immeuble qui doivent veiller à ne pas abuser de ce droit de retrait.
Si le syndicat de copropriétaires a mis en œuvre les mesures de prévention appropriées et les recommandations visant à protéger la santé et à assurer la sécurité du gardien, celui-ci ne peut, par principe, valablement faire valoir son droit individuel de retrait.
Le gardien d’immeuble ne pourra valablement faire valoir son droit de retrait que s’il a une raison objective de penser que les mesures prises par le syndicat de copropriété sont insuffisantes et s’il estime alors qu’il n’a pas d’autre option que d’exercer son droit de retrait pour éviter tout risque de contamination.
Et, si le syndicat de copropriété estime que le gardien d’immeuble n’avait pas de motif raisonnable de cesser son travail et qu’il a abusivement exercé son droit de retrait, il pourra le sanctionner et procéder à une retenue de salaire pour les heures non travaillées.
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