Quand l’assureur et son expert sont condamnés pour avoir sous-évalué l’importance des travaux de réparation après un sinistre

  • Post published:29 novembre 2017
  • Post category:Assurance
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L’assureur doit financer des travaux de réparation « efficaces et pérennes » même si l’expert qu’il a mandaté préconise des reprises limitées.

Désordres, indemnisation, réapparition des désordres

En 2001, M. et MME V ont déclaré à leur assureur multirisques-habitation un sinistre « catastrophe naturelle ».

L’assureur a mandaté un expert qui a estimé l’ampleur et le coût des travaux de réparation à réaliser.

Les époux V ont été indemnisés sur cette base et les travaux préconisés par l’expert de l’assurance ont été réalisés.

  1. et MME V. ont vendu, en 2004, à M. et MME A une maison d’habitation.

Courant 2006, M. et MME A ont observé l’apparition de fissures qu’ils estimaient être la conséquence de l’insuffisance des travaux de réparation effectués après le sinistre de 2001.

8 ans de procédure

A leur demande, un expert judiciaire a été désigné en 2009. Il a déposé son rapport en 2013.

Fin 2016, les époux A ont obtenu un jugement :

  • Reconnaissant la responsabilité de l’assureur et de son expert « du fait des dommages causés par les manquements dans les travaux de reprise »,
  • Les condamnant à verser aux époux A :
    • la somme de 57.327 euros au titre de la reprise des désordres,
    • 5.000 euros au titre de leur préjudice de jouissance et
    • 462,42 euros au titre de l’étude des sols qu’ils ont dû faire réaliser,
    • 3.000 euros au titre de leurs frais de procédure, outre le remboursement du coût de l’expertise judiciaire.


L’expert et l’assureur ont interjeté appel.

Mais, par décision du 6 novembre 2017, la Cour d’appel (Orléans, RG n°17/00299) confirmera le jugement.

Ainsi, au bout d’un long processus judiciaire, les époux A ont obtenu gain de cause.

En défense, l’expert d’assurance soutenait que sa responsabilité n’était pas engagée dans la mesure où les travaux qu’il avait préconisés avaient bel et bien permis de remédier aux désordres apparus en 2001.

Mais, ni le Tribunal, ni la Cour n’ont suivi ce raisonnement.

Les magistrats ont considéré « Que l’efficacité des travaux de reprise (préconisés par l’expert) ne porte que sur les dommages existants, non sur les interventions préventives visant à renforcer des immeubles pour qu’ils résistent à d’autres éléments aléatoires ».

Les 2 juridictions ont donc estimé que cet expert avait engagé sa responsabilité en limitant les travaux de reprise à la stricte réparation des dommages alors visibles, sans se préoccuper du devenir dans le temps du bâtiment.

La responsabilité de la compagnie d’assurance est également retenue pour s’être « bornée (par souci d’économie) à ratifier sans réserve les préconisations (…) du technicien qu’elle avait choisi de mandater » alors que ces préconisations excluaient « des reprises en sous-œuvre dont une étude exhaustive et attentive de la situation factuelle aurait montré la nécessité au professionnel qu’elle est et qui se devait de financer des travaux de reprise efficaces et pérennes ».

En conclusion

Cette affaire nous rappelle que les experts ne sont pas infaillibles et que leurs avis, leurs préconisations, leur analyse des garanties du contrat d’assurance peuvent être discutés.

Les assurés et/ou ceux qui les représentent ne doivent pas faire l’économie de cette discussion, sur le plan technique comme juridique, sauf à risquer de devoir ensuite batailler longtemps devant les Tribunaux et Cours pour obtenir enfin la juste indemnisation du sinistre subi.> Fichier PDF