Courant 2005, les époux A ont fait l’acquisition d’un appartement, en état futur d’achèvement. Ils imaginaient alors investir dans l’immobilier locatif à Carcassonne.
Les acquéreurs n’ont, en réalité, jamais pu louer l’appartement malgré les promesses qui leur ont été faites et qui les ont convaincus d’acheter.
Ils ont, au surplus, découvert que l’appartement payé 152.000 € valait en réalité entre 65.000 € et 85.000 €.
Ils ont également « perdu » l’avantage fiscal escompté,
En revanche, ils devaient rembourser la banque qui leur avait prêté la somme nécessaire pour réaliser cette acquisition.
Les époux A avaient pourtant reçu l’assurance de réaliser un investissement lucratif et sans risque…
Comme dans nombre de cas similaires, les investisseurs se sont vus expliquer en détails, plaquette commerciale à l’appui, les avantages de l’opération : défiscalisation, placement financier, « garantie locative », plus-value, etc.
En revanche, les risques ont été totalement passés sous silence et, spécialement, le risque de ne pas trouver de locataire, le marché local comptant pléthore de biens à louer…
De la désillusion aux condamnations
Les époux A ont donc porté l’affaire devant le Tribunal de grande instance de Carcassonne qui, en janvier 2012, leur a donné gain de cause.
Plus précisément, le Tribunal a annulé la vente et a condamné le vendeur à rembourser le prix payé.
Le Tribunal a également anéanti le prêt contracté pour financer cette acquisition.
Les emprunteurs doivent rembourser le capital restant dû, mais sont autorisés à déduire l’ensemble des frais liés au prêt (frais de dossier, intérêts et primes d’assurance déjà réglées).
Ces frais sont mis à la charge du vendeur et des commercialisateurs qui devront les payer à la banque, ainsi que l’indemnité de remboursement anticipé due à la banque.
Les acquéreurs se voient encore allouer une somme de près de 13.500 € à titre de dommages et intérêts.
La Cour d’appel de Montpellier confirme pour l’essentiel le jugement du Tribunal en précisant que l’annulation de la vente et du prêt sont justifiés par l’existence des dols commis par les professionnels qui ont conseillé et vendu aux époux A une opération d’investissement vouée à l’échec et l’acquisition d’un bien à l’évidence surévalué.
Saisie par le promoteur et les sociétés qu’il avait chargés de commercialiser les biens, la Cour de cassation approuve la Cour d’appel d’avoir retenu :
- que lorsque la SCI avait obtenu son permis de construire et fait démarcher M. et Mme X…, l’état de saturation du marché immobilier carcassonnais était déjà observable,
- que, malgré cette conjoncture dont elle avait connaissance, elle avait assuré aux investisseurs, par l’intermédiaire de la plaquette de commercialisation, une forte demande locative et un placement sûr et rentable à court terme et que l’immeuble leur avait été vendu à un prix qui dépassait de 30 à 50 % sa valeur réelle,
- que ces affirmations mensongères allaient bien au-delà de la simple exagération publicitaire
- et que c’est à partir de celles-ci que les sociétés Omnium conseil et Omnium finance avaient réalisé une étude financière personnalisée en faveur de M. et Mme X… et leur avait remis un dossier destiné à leur faire croire que leur investissement était avantageux et sans aucun risque.
De sorte que « la SCI et les sociétés Omnium conseil et Omnium finance avaient commis un dol qui avait déterminé M. et Mme X… à contracter et que le contrat de vente signé entre les parties devait être annulé » (Civ. 3ème, 7 avril 2016, pourvois n°14-24.164 et 14-25.446).
Cette décision de la Cour de cassation vient, en quelque sorte, fixer les conditions de l’anéantissement rétroactif d’un investissement immobilier désastreux.